Jurer n’est pas grogner.
Nous allons le montrer tout à l’heure (de La Fontaine à Hergé, il n’y a qu’un pas que nous ne manquerons de franchir en faisant un petit détour du côté de chez Georges B.)
Tandis que le grognement évoque un son prolongé tantôt rauque, tantôt sourd et mal articulé, le juron est ce mot exclamé de manière parfaitement intelligible. La bordée de jurons quant à elle, renvoie à un ensemble plus ou moins long d’objets du même genre.
Depuis le début du confinement, notre langage bourgeonne voire fleurit quasiment à la même allure que le printemps.
Le zut ou mince, alors ! s’est laissé supplanter par des termes plus guerriers tels que.. bip ou… bip.
(Oui, nous censurons,… histoire de ne pas courir le risque de causer comme des charretiers lors du déconfinement.)
Que notre langage s’orne peu à peu de pépites, sous le joug du «restez chez vous», est tout à fait explicable: nous quittons peu à peu nos masques sociaux (les voilà encore eux !).
Et comme cela fait du bien de se lâcher, d’exprimer haut avec force et conviction, la puissance de nos émotions, nous nous délectons en lançant une bordée de jurons tel le Capitaine Haddock se sentant partir à l’abordage de…. (relâchez la pression !)
A ce stade, rien à voir avec le banal grognement.
Cependant, faisons-le élégamment ! Renouvelons-nous !!
Et pourquoi pas, de manière à épater la galerie, en allant chercher des pépites dans les chansons de Georges par exemple pour ce qui concerne les palsambleu ou les jarnicotons, ou dans les phylactères attribués à Haddock pour ce qui concerne les sabords à la puissance trois.
Hé oui, c’est que le juron se cultive ! Cela demande de la créativité, de la lecture et une certaine forme de raffinement.
Le juron n’est pas une insulte, ni une violence envers l’autre ou envers soi. Il a cette capacité de traduire avec simplicité et authenticité la force de ce que nous éprouvons.
Lorsque vos proches diront: « Tiens, je ne le connaissais pas celui-là ! », vous saurez que vous avez enrichi votre langage d’un pan lexical peu usité, certes, mais salutaire.
Cultivez vos jurons, laissez vos enfants et proches s’exprimer. Il sera bien temps de reprendre nos masques sociaux (et sanitaires) après le 11 mai, pour revenir à plus de ….retenue.
Coécrit avec Françoise Collomb de Made In Chez Moi.